Depuis 2022, l’Irlande expérimente le dispositif pilote du Basic Income for the Arts ou Revenu de base pour les arts, un projet conçu pour aider le secteur culturel à se remettre après l’épidémie de COVID-19. 2000 artistes choisi·es par tirage au sort parmi les candidatures éligibles reçoivent 325 € par semaine tout en participant à une évaluation de l’impact du programme.
Après trois ans d’existence, un bilan enthousiasmant a été publié par Patrick O’Donovan, ministre de la Culture, des Communications et des Sports, qui souhaite pérenniser ce dispositif. Il annonce que le projet pilote a produit plus de 100 millions d’euros d’avantages sociaux et économiques. Pour chaque euro d’argent public investi, la société a reçu 1,39 euro en retour.
Les conclusions du rapport montrent que le coût fiscal net du projet pilote pour la période 2021-2025 s’est élevé à un peu moins de 72 millions d’euros. L’engagement du public dans les arts a généré une valeur sociale estimée à 16,9 millions d’euros sur la base de la disposition à payer pour la participation culturelle. Et le gain social le plus important a découlé de l’amélioration du bien-être psychologique, qui a contribué à hauteur de près de 80 millions d’euros au bénéfice total.
Le rapport constate par ailleurs que les revenus liés aux arts des bénéficiaires ont augmenté de plus de 500 euros par mois en moyenne, tandis que leurs revenus provenant d’activités non artistiques ont diminué d’environ 280 euros. La dépendance à l’égard de la protection sociale a diminué, les bénéficiaires recevant en moyenne 100 euros de moins par mois et étant à 38% moins susceptibles de percevoir des allocations chômage.
Pérennisation plébiscitée, modalités à améliorer
Fort de ces résultats, le ministre de la Culture a convenu de la pérennisation du programme avec les ministres chargé·es des dépenses publiques. Une nouvelle session sera ouverte à partir de septembre 2026. Une consultation publique menée auprès de 17’000 participant·es témoigne du soutien populaire accordé au Revenu de base pour les arts avec 97 % de répondant·es favorables à sa continuation.
Les artistes qui toucheront le Revenu de base pour les arts resteront cependant peu nombreux·ses. Seul·es 2000 d’entre elleux seront sélectionné·es, 2200 si des fonds supplémentaires peuvent être trouvés. Les modalités de sélection des artistes sont par ailleurs encore floues bien que l’opinion publique penche à plus de 50% pour une sélection fondée sur le besoin économique des artistes plutôt que sur le hasard ou le “mérite artistique”. La consultation publique s’est également portée sur le montant du revenu : plus de 50 % jugent le montant actuel de 325 €/semaine adéquat tandis que 44 % le jugent trop bas.
Il va sans dire que les critères d’accès à ce revenu seront décisifs pour qu’il soit à même de répondre à la précarité qui touche de nombreux·ses acteur·ices du secteur culturel, en Irlande comme ailleurs. Le mouvement populaire NCFA – National Campaign for the Arts salue les résultats du projet pilote mais revendique la nécessité de prévoir des moyens supplémentaires pour répondre à la réalité des artistes.
La projet pilote irlandais a bénéficié d’un fort rayonnement à l’échelle internationale. Patrick O’Donovan indique que des délégations d’Australie, du Pays de Galles, de Corée du Sud, du Canada, de Norvège, de Lituanie, d’Estonie ou encore de la présidence belge du Conseil de l’UE ont témoigné leur intérêt pour le modèle.1
Image : NCFA – National Campaign for the Arts
